Dans la vision de JR, le vin n’est jamais un simple accompagnement. Il est le prolongement naturel d’un plat, un partenaire silencieux qui en révèle la subtilité, l’équilibre ou parfois même le mystère. Chaque gorgée devait résonner avec la bouchée précédente, dans un dialogue sensoriel pensé avec une précision horlogère. L’harmonie entre la table et le verre ne pouvait pas être improvisée. Elle se construisait avec humilité, expertise et un profond respect des produits comme des traditions.
JR considérait que la connaissance du vin était une extension indispensable du métier de cuisinier. Comprendre les tanins, deviner l’acidité, sentir la fraîcheur ou la profondeur d’un cru permettait d’ajuster une sauce, de retravailler un assaisonnement, de réimaginer un équilibre gustatif. Ce lien intime entre les accords et la création culinaire était l’un des piliers de son style.
Les caves associées à l’univers de JR n’étaient jamais de simples réserves. Elles étaient conçues comme des bibliothèques de mémoire liquide, des archives de savoir-faire et d’émotion. Chaque bouteille y avait une place justifiée, une raison d’être, une histoire à raconter. La sélection des références répondait à des critères très exigeants : qualité bien sûr, mais aussi cohérence avec la cuisine, potentiel de vieillissement, expression d’un terroir unique.
Il ne s’agissait pas d’impressionner par la rareté ou le prestige des étiquettes, mais de proposer une lecture du monde à travers le vin. Les sommeliers, formés avec rigueur, savaient que leur rôle allait bien au-delà du service. Ils étaient les interprètes d’un langage à traduire avec délicatesse, capables de proposer l’inattendu sans jamais perdre de vue l’essentiel : l’émotion du convive.
JR n’a jamais envisagé le sommelier comme un simple technicien du vin. À ses yeux, il s’agissait d’un artiste à part entière, doté d’une écoute fine, d’une intuition rare et d’une immense culture. Il travaillait main dans la main avec eux, dialoguant sur les accords, les nouveautés, les tendances émergentes, mais aussi sur la manière de présenter, de surprendre, d’ouvrir un horizon gustatif au client.
Cette relation de confiance, nourrie par une passion commune, a permis de former des sommeliers d’exception, devenus à leur tour des références dans leur domaine. L’accompagnement du repas était pensé comme une expérience totale, fluide, invisible, mais profondément marquante. Proposer un vin, c’était raconter une histoire, faire deviner un paysage, évoquer un sol, un climat, une main qui cultive.
Loin de se limiter aux appellations les plus célèbres, JR aimait explorer les régions moins attendues. Il savait que la noblesse d’un vin ne dépendait pas uniquement de sa renommée, mais de la sincérité de son expression. Il valorisait les terroirs authentiques, les vignerons engagés, les cuvées rares parfois méconnues, mais d’une pureté remarquable.
Les cartes proposées dans ses établissements faisaient cohabiter les grandes signatures et les découvertes confidentielles. La Bourgogne dialoguait avec l’Alsace, le Bordelais s’ouvrait à la Loire, le Rhône laissait place à quelques merveilles du Jura ou du Languedoc. À l’international, l’Italie, l’Espagne ou encore le Japon trouvaient leur place, toujours dans une logique d’élégance, de justesse, de respect de l’identité du vin.
Si le vin occupait une place centrale, les spiritueux n’étaient pas en reste. JR y voyait un art à part entière, fait de patience, de maîtrise du temps, de transformation subtile. Les digestifs, les apéritifs, les liqueurs, les eaux-de-vie, les whiskys, les rhums ou les cognacs avaient leur rôle à jouer, dans la continuité de l’expérience ou pour en initier une nouvelle.
Les bars intégrés à ses établissements n’étaient jamais pensés comme de simples lieux de consommation. Ils étaient des écrins dédiés à la dégustation lente, à la contemplation, à la conversation posée. Les cartes de spiritueux reflétaient la même exigence que les cartes de vins : une sélection affinée, une mise en valeur du travail des distillateurs, un souci constant de cohérence avec l’univers culinaire et esthétique global.
L’art des accords mets et vins, ou mets et spiritueux, était pour JR une passion durable. Il n’y avait pas de règle figée, seulement une ligne directrice : rechercher l’émotion juste. Il aimait les contrastes subtils, les résonances inattendues, les dialogues discrets entre une texture et une longueur en bouche. Une volaille tendre pouvait s’élever grâce à un blanc minéral ; un poisson pouvait s’entourer d’un rouge léger. Il n’y avait pas de dogme, seulement un goût sûr et une sensibilité à fleur de peau.
Ces accords étaient toujours proposés avec humilité. Ils n’étaient jamais imposés. Le client restait libre, guidé mais jamais contraint. C’est cette finesse, cette capacité à accompagner sans diriger, qui faisait la singularité de l’approche de JR. Il savait que la réussite d’un accord ne se mesure pas seulement à la technique, mais à la joie qu’il procure.
Derrière chaque vin, chaque spiritueux, JR voyait une porte ouverte. Une invitation au voyage. Non pas un déplacement géographique, mais une exploration intérieure. Le vin, pour lui, pouvait évoquer un souvenir d’enfance, une rencontre oubliée, une émotion diffuse. Il ne buvait pas, il goûtait. Il ne cherchait pas l’effet, mais la profondeur. Cette manière de vivre le vin, de le respecter, de le célébrer, transparaissait dans chaque décision, chaque association, chaque mot prononcé au moment du service.
Pour JR, le verre était aussi important que l’assiette. Il savait que la mémoire d’un repas peut naître d’une couleur, d’un arôme, d’une sensation fugace. Le vin et les spiritueux faisaient partie intégrante de cette mémoire. Ils étaient la note finale ou l’ouverture, le point d’équilibre ou la surprise. Leur rôle n’était jamais secondaire, mais essentiel à l’expérience complète.